jeudi 15 mai 2008

La pause C.L.A.P. pour tous les Français !


(nous vous conseillons de "cliquer" sur cette image afin de l'admirer dans toute sa puissance)


(Paris-Match n°1085, 1970 - 4eme de couverture)
Auteur : agence de publicité "La Vente Moderne", Lyon.

Note de l'Hippopotable : ****

Vous le savez, notre blogue s'est donné pour but de faire reculer les limites de ce que la critique veule et conformiste considère comme les formes "nobles" de la littérature. C'est pourquoi nous avons déjà publié des notules sur les plus grands chef-d'œuvre de la brochure ou du roman-photo.

Nous poursuivons aujourd'hui cette tâche de de renouvellement de l'horizon littéraire en chroniquant pour la première fois une simple publicité. Oui, "simple", mais non dénuée de qualités stylistiques, sémiologiques et même pindariques (1).

Pour vous en convaincre, il vous suffit de lire avec attention le texte - court mais d'une puissance évocatrice à couper le souffle - qui constitue le cœur de cette réclame :



Un style rythmé, viril, sans forfanteries, affèteries ou inutiles gongorismes (2). L'auteur ne recule pas devant l'emploi de néologismes anglo-saxons tels que "drivée" ou "break" : nécessaire dépoussiérage de la langue, loin des conventions académiques.

Mais derrière ce message en apparence monosémique , voire stupide, se cachent plusieurs niveaux de lecture. A l'instar de l'œuvre d'Homère, du "Mahabarata" ou de "Da Vinci Code", la réclame "CLAP" recèle de nombreux trésors caché. Invisibles pour le lecteur pressé, ils sont pourtant là, prêt à être extraits de leur gangue, tels de précieux joyaux.

Nous ne souhaitons pas vous priver du plaisir de les découvrir par vous même. En voici juste deux, à titre d'exemple - souhaitons qu'ils provoquent des vocations de cryptophiles (3) chez nos lecteurs.


1- La Venus à la saucisse de Francfort

Qui est-elle ? Trempe-t-elle sa saucisse dans son gobelet de café au lait ? Divinement belle, inaccessible, parée aux couleurs de Stendhal et Jeanne Mas, elle semble nous dire : "Moi, je suis passée de l'autre côté du miroir".

2- L'Homme Noir à la Pipe


Derrière les magasiniers, un intrus observe la scène, un sourire sardonique à la bouche, une pipe aussi. Tout l'oppose à ses voisins : noirceur du vêtement et du visage, expression satanique contre innocente candeur, lunettes d'intellectuel contre blouse de prolétaire.

Qui est cet homme ?

Un concurrent ? Un ancien directeur financier éconduit, qui rôde en quête de vengeance ? L'auteur de la réclame, qui s'y serait représenté, fixant l'objectif à l'instar d'un maître flamand du XVIIeme siècle ?
Ou peut-être...l'âme damnée de Louis George BATIER, son Méphistophélès, avec qui l'ambitieux entrepreneur aurait passé quelque pacte, échangeant une réussite financière éclatante contre la perte de tout esprit critique en matière de publicité ?
Nous vous laissons méditer sur ces hypothèses.

Et nous vous livrons un dernier sujet de réflexion : pourquoi, nulle part dans cette annonce, n'est-il précisé ce que signifie l'acronyme C.L.A.P. ? Quels mots terribles et puissants se dissimulent donc derrière ces quatre lettres ?

Si un lecteur est en mesure de nous l'expliquer, qu'il laisse ici un commentaire !




Un ouvrage indispensable




(1) Qui imite la manière de Pindare. La grande ode pindarique à Michel de L'Hôpital (Thibaudet, Réflex. litt., 1936, p.20). [Avec une idée d'exaltation, de style emphatique]

(2)
Abus de termes abscons et recherchés ; Esthétique précieuse qui s'exprime dans l'œuvre du poète espagnol Góngora et s'est répandue en Espagne et en France au début du xviie siècle. Le gongorisme, le conceptisme, le cultisme viendront renforcer l'action de la préciosité (Brasillach, Corneille, 1938, p. 61). Ce blogue abuse décidément du gongorisme, mon vieux ! (Raymond Cartier, note de service à l'auteur de ce billet)

(3) Ce mot n'existe pas.